Nous sommes le 28 mai 2022, comme les 28 jours d’un cycle menstruel ! Ça tombe bien puisqu’aujourd’hui est la journée mondiale de l’hygiène menstruelle. L’occasion de faire le point sur ce sujet tabou encore en 2022. Nous avançons doucement mais sûrement !
Inez Jean-Baptiste
Qui l’eut cru, une journée mondiale de l’hygiène menstruelle ! Ce fameux jour des règles a été mis en place le 28 mai 2014 afin de briser le tabou et les préjugés autour des menstruations ainsi que de pointer du doigt la précarité menstruelle. On peut remercier à l’organisation non gouvernementale WASH United (baptisée May #MENSTRAVAGANZA en 2013), si cette journée existe aujourd’hui.
Pourquoi les publicités sur les protections hygiéniques à la télévision ne montrent jamais réellement une femme qui a ses règles ? En réalité, tout le tabou autour des menstruations et de la couleur du sang des règles ne date pas d’hier. Direction les Etats-Unis dans les années 60 où il était interdit de programmer une publicité sur les règles. C’est seulement en 1972 que l’interdiction est levée même si le mot “règles” est censuré. 20 ans après, la censure est levée à la télévision avec l’actrice Courtney Fox pour la marque Tampax !
En France, c’est encore différent. On ne voyait que des femmes s’épanouir dans la vie quotidienne comme si tout était positif dans le fait d’avoir ses règles et ce sans jamais vraiment montrer l’envers du décor. On restait sur des packagings roses très mignons, puis du sang représenté par la couleur bleue. Une impression de légèreté n’est-ce pas ?
Alors non, notre sang n’est pas bleu comme ce que l’on peut voir sur nos écrans. Il a fallu attendre 2018 pour que le sang des règles soit représenté de couleur rouge et il s’agit d’une publicité uniquement visible sur Internet. Pour la télévision, on attend encore puisqu’ils ne veulent pas “heurter les téléspectateurs”… Oh mon Dieu, le sang des règles…
Claire Blandin, professeure des sciences de l’information et de la communication explique que ces publicités existent en réalité pour nous vendre du rêve, du bonheur et de la liberté à travers les protections périodiques. Waouw. Quelle liberté que de devoir mettre un tampon. L’objectif est simple : vendre son produit.
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Souvenez-vous en 2019, la publicité de la marque Nana avait suscité les débats avec 400 plaintes auprès du CSA, pourquoi déjà ? Ah oui, la représentation de la vulve… Avec le clip censuré de Suzane on était sur du “Clit is good” et sur la publicité Nana “Vive la vulve”, décidemment le corps de la femme pose tant de problèmes que ça ?
Si les marques essaient de faire évoluer les mentalités, cela est en partie grâce aux mouvements féministes et militantismes qui sont de plus en plus nombreux chaque jour.
60 ans de tabou encore présent aujourd’hui, on aimerait bien en connaître l’origine… Spoiler alert : une société patriarcale est passée par là !
Si certaines d’entre vous ont honte d’avoir une tache de sang ou de demander des protections périodiques publiquement c’est parce que pendant des siècles, les menstruations des femmes étaient vues comme sales et impures par les hommes. A l’époque médiévale, les hommes pensaient que les femmes ayant leurs règles étaient des sorcières puisqu’elles perdaient une grande quantité de sang sur plusieurs jours tout en restant en vie. Mais vous vous en doutez, le sang des règles n’a rien de satanique, au contraire c’est un élément naturel et signe que l’on peut donner la vie.
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D’ailleurs l’humiliation des règles porte un nom : le “period shaming”. L’expression anglaise fait référence au fait de baisser la voix pour parler de ses menstruations ou d’utiliser d’autres termes pour les désigner. Cela passe par la censure de photos sur les réseaux sociaux ou dans les publicités télévisées avec le sang de couleur bleu.
Ce fameux tabou des règles a, en réalité, toujours été de contrôler le corps et l’esprit des femmes une fois de plus. Inconsciemment, ces injonctions sociales ont obligé les menstruées à tout mettre en œuvre pour cacher leurs règles. La société laisse penser qu’elles ne doivent ni laisser voir, ni laisser entendre qu’elles ont leurs règles. Souvenez-vous du scandale des menstruées : Britney Spears en 2008 et Madison Beer en 2017, qui exposaient involontairement leur entrejambe taché de rouge à l’œil avisé de la presse people. Une vague de haine et d’insultes s’était déferlée sur les deux célébrités…
Les règles ne font pas de vous le sexe faible mais le sexe fort puisqu’elles vous donnent le plus grand des pouvoirs : celui de donner la vie. Alors ça ne devrait en aucun cas être une honte mais une fierté. Le tabou des règles relève de plein d’autres problèmes sociétaux, le chemin pour éradiquer ce tabou reste encore long mais ensemble, nous y arriverons.
“La précarité menstruelle est un enjeu collectif et une véritable question de dignité, de solidarité et de santé. Il est inacceptable qu’en 2021, on doive choisir entre se nourrir et pouvoir se protéger.”
Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation